1955 – NEVERS – Si la ville avait été américaine, il est fort à parier que l’événement aurait passionné Jay Anson, le célèbre auteur de Amityville. C’est cette année-là que des agents de la Ville, occupés à la restauration de canalisations, virent remonter à la surface… des restes humains.
UNE RUE BIEN NOMMÉE
La scène s’est déroulée rue du Charnie (il y avait comme qui dirait un indice). Si la découverte effraie les habitants du quartier, elle ne surprend en rien les historiens qui connaissent l’existence d’un cimetière dans le quartier où l’on a enterré, dans les années 1436, des victimes de la peste.
25 MILLIONS DE MORTS
À cette époque, la Peste Noire décime la moitié de la population de l’Europe, environ 25 millions de victimes, entre 1347 et 1352, après avoir envahi l’Asie, le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord. En un siècle, la France a perdu 7 millions d’habitants (sur les 17 qu’elle en comptait) et mettra trois siècles à retrouver sa population d’avant 1347. À Nevers, en 1399, les élites se retrouvent démunies : les dépenses ne servent à rien et les antibiotiques n’apparaîtront que 600 ans plus tard. On finit pas recourir… à la prière et à la piété. Les autorités municipales font fabriquer « une broche de fer pour la rue de la chandelle qui est offerte en l’église Saint-Cyr pour la mortalité
et épidémie ». Ainsi de 1419 à 1420, le jour de la Madeleine (qui semblerait correspondre à la Toussaint, le jour des morts), on fabrique une chandelle mesurant la longueur de l’enceinte de la ville soit 1700 toises (l’équivalent de 3317 mètres).
UNE INVITÉE PENDANT 300 ANS
Mais la foi n’y suffit pas. Entre 1438 et 1473, la peste reprend ses quartiers à Nevers, remplissant le cimetière de la rue du Charnier, s’amenuisant petit à petit jusqu’à ne plus provoquer que des bubons (peste la plus répandue et la moins dangereuse) entre 1520 et 1580. On envoie alors les pestiférés hors de la ville, dans une maison à la Chaussée (actuellement rue Paul Vaillant-Couturier) appartenant au Prieur de Saint-Etienne pour tenter de les soigner. Il faut attendre le milieu du XVIIe siècle pour la voir disparaître définitivement de la ville après 300 ans de villégiature (de quoi faire rêver les acteurs du tourisme !) et 64 morts dont on retrouvera, en 1955, une vingtaine d’ossements…