Nivernais d’origine, papa de deux enfants, ancien artisan reconverti dans les télécommunications, Adrien Aufevre est devenu maire de Livry en 2020, village de 700 habitants sur les rives de l’Allier. Cet édile trentenaire, qui ne conçoit pas la politique comme un métier, mais comme une mission, a mis son audace au service de l’intérêt général.
Quels sont les forces et les faiblesses de votre village ?
Adrien Aufevre : Livry a un gros potentiel grâce à l’Allier, propice aux sports de plein air, à la tradition viticole et à la jonction de deux véloroutes. Mais Livry manque de commerces de bouche. En 2020, nous avons créé un marché de producteurs locaux, avec l’été des concerts et de multiples animations. Par ailleurs, en l’absence d’épicier, nous avons eu l’idée de proposer une épicerie automatique de produits locaux avec au total 136 casiers secs et réfrigérés. Un boulanger bio nous a par ailleurs contactés pour s’installer à Livry. Nous allons réunir ces deux services dans une ancienne grange. Il me semble important de rénover plutôt que de construire quelque chose qui n’a pas d’âme. À Livry, vous ne trouverez aucun lotissement !
Comment avez-vous fait pour attirer l’entreprise Ville à Joie (voir encadré) ?
Nous avons répondu à un appel à projets en 2021 pour que cette initiative – un collectif de jeunes qui propose des services publics en itinérance dans les territoires ruraux – vienne chez nous. J’ai sympathisé avec le directeur de La Ville à Joie et je leur ai trouvé une vaste maison en bord d’Allier. Elle est devenue leur siège social ; une douzaine de salariés y travaillent désormais.
On dit souvent que, depuis le confinement, il y aurait un mouvement des urbains vers les communes rurales. Qu’en pensez-vous ?
On ne va pas aller jusqu’à parler d’exode urbain ! Mais les évolutions en matière de téléphonie et de télétravail permettent de vivre autrement dans les campagnes. Or ces urbains désirent avoir accès aux mêmes services qu’en ville, comme les commerces ou la culture. À la campagne, la « boîte à culture » reste souvent la télévision. À Livry, nous voulons changer cela. Désormais, il y existe une saison estivale, avec du théâtre, du cinéma en plein air et des concerts.
Comment parvenez-vous à trouver des subventions ?
La recherche de subventions est un aspect que j’adore. C’est du lobbying : il faut aimer rencontrer les autres, depuis le préfet jusqu’au président de la République en passant par les conseillers départementaux et régionaux. Tous nos projets ont été subventionnés à hauteur de 70 à 80 % ; c’est le plafond maximal. Grâce au fondateur de Ville à Joie, nous avons eu la chance d’accueillir François Hollande l’an dernier. Depuis, nous pouvons échanger régulièrement avec lui. J’ai aussi pu me rendre à l’Élysée pour transmettre à Emmanuel Macron un dossier concernant les aides à la revitalisation des communes de moins de 2 000 habitants, pour l’instant réservées aux communes plus importantes.
Vous exercez un métier en plus de votre mandat de maire. Comment faites-vous pour tout gérer de front ?
Pour moi, la politique n’est pas un métier, mais une mission. Je travaille depuis l’âge de 16 ans et il me semble que les liens que je tisse dans le cadre de mon métier permettent de faire germer les idées. Quand on est enfermé dans sa mairie, ce n’est pas là qu’on est le plus productif, c’est sur le terrain !
Ville à Joie, l’entreprise qui cherche à redonner vie aux villages
Entreprise du secteur de l’économie sociale et solidaire, Ville à Joie organise des tournées dans les villages en mal de commerces et de services publics. Des tournées conçues comme des moments festifs et qui sont l’occasion aussi bien de se faire tester la vue par un opticien que de consulter un médecin ou d’obtenir des renseignements sur ses impôts avant d’assister à un concert ou de dîner sur la place du village. « Nous avons une dizaine de salariés au siège à Livry mais nous nous déplaçons dans la Nièvre mais aussi dans le Pays Picard, le Centre-Cher et le Pays interrégional Bresle Yères en Normandie, détaille Marius Drigny, le tout jeune fondateur de l’entreprise. Aujourd’hui nous recherchons des personnes motivées pour nous aider à redonner vie aux villages ». Ville à Joie, 96, route de l’Allier, Livry. Les dates des tournées sont à retrouver sur villeajoie.fr
Propos recueillis par Virginie Jannière.