Pour des vacances, on peut bien sûr confier sa destinée à un Tour operator. Mais on peut aussi compter sur soi. En solitaire ou en famille, tester la micro-aventure dans la Nièvre est avant tout un moyen de s’inventer son histoire. Venez redécouvrir les vertiges de l’inattendu et faire la nique au consumérisme et au tourisme de masse. Alors voici trois idées qui ouvrent la voie à la seule chose infinie de la vie : votre capacité à imaginer
Les visiteurs
Sur la trace des chevaliers, ma première micro-aventure dans la Nièvre
Quand j’étais môme, je passais des heures avec mon cousin Sory (qui n’a jamais été mon cousin d’ailleurs) dans la ferme de Tonton Hubert, un instituteur myope de Villeroy. Nous nous imaginions chevaliers (de temps en temps fabricants de vin à base d’œuf pourri et de terre) et évidemment, il y avait des princesses. Quarante ans plus tard, l’embourgeoisement étant proportionnel à l’âge, il est temps pour moi, Chevalier de Villeroy, d’aller m’enquérir de mes châteaux dans les contrées nivernaises et au delà.
Conquête 1 : La Motte-Josserand
Et parmi les châteaux correspondant à mon standing imaginaire et mes époques utopiques, la Motte-Josserand me semble être un bon départ.
C’est en fait une ancienne maison-forte datant de 1248, flanquée sur le Nohain, parmi les plus belles représentations de l’architecture militaire médiévale.
Comme disait Oscar Wilde : « J’ai les goûts les plus simples du monde, je me contente du meilleur ». Pour me situer dans le temps, je me souviens qu’en l’an de grâce 1248, la France est sous le règne de Saint-Louis qui entame la 7e croisade. La Nièvre est sous l’autorité du comte Gaucher de Châtillon-Nevers et Notre-Dame de Paris ne sera achevée que dans 100 ans.
L’actuel propriétaire de la Motte-Josserand est un descendant du meunier Jean-Baptiste Monmignot qui l’acquiert en 1856. Désormais, plus d’échelles, de batailles, d’archers et d’huile bouillante. Le château est au repos, ouvert à quelques visites durant l’été (sur rendez-vous).
Conquête 2 : Visiter l’inconnu
Pour poursuivre ma conquête chevaleresque – ma micro-aventure dans la Nièvre – il me faut deux choses : une monture et une princesse. Pour la monture, là aussi je me suis embourgeoisé. J’ai choisi une monture motorisée à deux roues mais on peut aussi opter pour un vélo, la marche à pied et le top : le cheval. Tout ça pour rejoindre le chantier de ma prochaine demeure -imaginaire- Guédelon. Mais attention, nous sommes en 1248 et comme à l’époque, toutes les routes ne sont pas goudronnées… . Les 25 km qui me séparent ne vont pas se faire en un jour (enfin si mais c’est une expression). Deux possibilités : la départementale, dangereuse, ou les petits chemins de campagne par les itinéraires piétons. Le gros avantage des itinéraires piétons c’est qu’ils vous font passer dans des endroits que jamais vous n’auriez eu la curiosité de visiter.
Arrivé à Ciez, un petit bistrot « du ruisseau » fait une halte bien agréable… mais il est fermé quand je passe. Rue du Champs Soleil, je trace… Villesauge (à la patte d’oie, prendre à gauche !) puis arrivée sur une autre patte d’oie où je prends cette fois le chemin direction Bouhy. L’arrivée à Bouhy, c’est les USA : le château d’eau ressemble à la première fusée-sonde, baptisée Véronique. Mais pour moi, c’est un drive-rock’n’roll-filles en patins à roulettes… sans le décorum.
À Bouhy, j’ai aussi appris que le Moulin de Blot était habité par un meunier qui ne dort pas mais confectionne les sablés du moulin, une spécialité vendue uniquement sur place. Pour 3 écus, pardon euros, on peut aussi visiter le moulin. Sortie de village, direction Bois Vaugerin / Chapelle Sainte-Anne. Un peu plus loin c’est la frontière entre le Nivernais et l’Yonne. Pas un douanier roussi à l’horizon, je poursuis donc mon galop à travers la plaine, sur le chemin qui marque la limite entre ces deux contrées, pour lesquelles des milliers d’hommes sont morts.
Conquête 3 : Le château de Ratilly
Aux routes succèdent des chemins. Je passe près de Treigny, un petit village avec beaucoup de charme qui marque l’entrée dans le parc naturel de Boutissaint, une grande réserve d’animaux sauvages. Je passe aussi près du panneau Bel-Air. J’irais bien serrer la pince au Prince mais mon château de Ratilly m’attend.
Daté lui aussi du XIIIe, plus de soldats et de courtisans, le château en plein bois a été transformé en Centre d’Art contemporain privé et accueille, depuis un demi-siècle, de nombreux concerts, expositions, projections durant l’été et est l’un des fleurons du patrimoine médiéval nivernais. Tout s’embourgeoise ma petite dame.
Victoire : Guédelon
Un peu plus d’un kilomètre de chemin au milieu des bois et me voilà donc en visite de chantier à Guédelon, où je ne suis pas allé depuis 3 ans.
Dès l’entrée, le château impose son ombre inhabituelle avec un sentiment bizarre : le château vit ! Car oui, au-delà des artisans qui travaillent à la fabrication des outils, de la corde, des vêtements teints aux plantes cultivées sur place, des tailleurs de pierre, des tuiliers etc, il y a la poussière et les bruits de ce qu’était la vie au XIIIe siècle, sans voitures, sans usines, sans technologie.
Un bruit où la vie de l’homme se mêle à celle des animaux (et particulièrement des oiseaux). Je peux enfin me sentir roi en mon royaume, tel un preux chevalier de province visitant ses contrées et des terres à dos de sa monture (à essence pour l’occasion).
Alors certes, il faut avoir beaucoup d’imagination pour se sentir propulsé 800 ans en arrière et si vous trouvez ça ridicule, dites-vous que Guédelon accueille 300 000 personnes par an qui paient pour visiter… un chantier. Ce qui reste assez surprenant c’est que partir à travers les petits chemins vous fait vivre une expérience inhabituelle et incroyable : celle de rencontrer, de sourire et de parler à des inconnus qui, comme moi, se promenaient… et à notre époque, c’est précieux !
Man vs Wild
Bivouac au lac dans le parc du Morvan, seconde étape de ma micro-aventure dans la Nièvre
Admettons-le ! Nous ne sommes pas du tout des grands sportifs et si ce n’était pour l’amour de la Nièvre, franchement, on se serait bien pris une chambre d’hôte. Mais comme le but du jeu est de raconter ce que l’on vit, alors on s’est dit qu’on allait faire au minimum : aller planter la tente sur un lac du Morvan. Alors attention : déjà en cherchant un peu, on apprend que seuls 4 lacs autorisent le camping sauvage : Chamboux, Chaumeçon, Saint Agnan et le lac du Crescent.
Défi 1 : Trouver le parking
Au hasard, on a pris Chaumeçon : on connaît. Il y a un barrage là-bas… En arrivant de Brassy, le premier défi consiste à trouver… le lac, et un parking pour se garer. Sur un panneau, je vois « rafting ». Je me dis : rafting = parking alors je prends la D235… oui mais, la D235 est très longue et 18Km plus tard, je peux enfin poser la voiture, charger mon sac, vérifier 3 fois que mon portable est au taquet, que je n’ai pas oublié l’appareil photo. En descendant vers le lac, je m’attendais à un chemin balisé… en fait non.
Une succession de plages de sable, d’herbes et parfois aussi des berges si abruptes qu’elles m’obligent à remonter vers les bois (car il n’y a que ça) en prenant toujours soin de voir l’eau de loin, pour être certain de ne pas me perdre. Très vite, je m’aperçois que derrière moi se dresse le barrage… et franchement c’est assez effrayant de se dire que ce truc en béton retient 20 millions de mètres cubes…
C’est aussi assez impressionnant de savoir que ce lac est artificiel et a été construit en 1933 pour éviter les crues à Paris… mais du coup, la version feignasse de la rando se transforme en « je n’ai pas vraiment envie de m’installer au pied du barrage » alors je marche un peu. En plus la pêche et la baignade sont interdites à moins de 500 m du barrage…
Défi 2 : Se trouver un coin pour se “poser”
Après deux bonnes heures, je choisis un bout de plage pas trop grand pour que tout le monde ne s’y presse pas (car 100 m plus loin, j’aperçois un parasol !) et pas trop petit au cas où un crocodile, le monstre du Loch Ness, un moustique tigre ne décident de venir me chatouiller les orteils.
La soirée est consacrée à la baignade – je verrai plus tard pour assurer ma pitance – et franchement, c’est le pied ! On est en juin alors, on ne va pas vous mentir, ce n’est pas les Caraïbes… il faut un certain temps pour rentrer dans l’eau. Mais une fois congelé, la sensation d’être au milieu de l’eau entouré d’un paysage tout en rondeur, d’une sensualité incroyable, est inédite. Au bout d’une heure, la faim et le froid me
font sortir de l’eau : c’est bien d’être contemplatif mais on ne bouge pas…
Côté cuisine, je me dis que ce doit être génial de pêcher son poisson, de le faire cuire et de savourer le fruit de son travail. En ce qui me concerne, j’ai fait plus simple : un casse-croûte préparé à l’avance et un thermos de café.
Pour deux bonnes raisons : je n’ai jamais pêché et je ne fais pas la différence entre une carpe et une truite… Une fois le « festin » bouclé, me revient mon inexpérience : je me rends compte que j’ai oublié deux choses essentielles : un sac pour les déchets et le sucre (tant mieux pour mon diabète !). Un dernier coup d’œil aux étoiles et me voilà man vs wild prêt à enfiler mon pyjama tartan (c’est mon côté British) et à me glisser dans mon sac de couchage (trop petit ou alors est-ce moi qui suis trop grand) et à dormir paisiblement.
Défi 3 : Accepter le réel
Normalement je devrais dire que je me réveille avec les rayons du soleil s’infiltrant par les quelques espaces telle la caresse de celle-celui-ceusses que l’on aime au petit matin…
En fait, ce qui me réveille, c’est le Morvan. Chaumeçon est à 400m au-dessus du niveau de la mer (2X plus que Nevers)… et à 400m, dans le Morvan, ça pique les yeux quand on est un citadin pas très prévoyant… et le café froid n’arrange rien (où sont les thermos de nos grands-mères qui gardaient le café chaud une semaine ?).
En plus, faire cette micro-aventure dans la Nièvre seul peut être un peu déconcertant. J’ai épié un bon moment tous les bruits autour de moi et comme je n’ai pas l’habitude de vivre au milieu des bois, le côté « solitaire » peut effrayer. Mais bon. Franchement, je n’ai qu’une envie : passer le reste de la journée à buller et à me baigner, d’autant que la météo semble plus clémente.
Camper ou bivouaquer ?
Attention, ce n’est pas la même chose : si vous bivouaquez, vous passez
généralement une seule nuit et à peu près tous les lieux sont autorisés entre 19h et 9h (sauf les routes et les lieux privés bien
entendu !).
Une chtite merguez ? Bivouaquer ne veut pas dire barbecue ; la plupart des lieux sont interdits aux feux. Il faut donc se référer à la réglementation de chaque endroit. Si toutefois vous faites un feu, assurez-vous de bien l’avoir éteint avant de partir… Le Morvan est connu pour ses sapins !
Dans tous les cas :
• On ne laisse pas ses déchets sur place
• On remet l’endroit plus propre qu’on ne l’a trouvé
• On évite de faire ses besoins naturels dans des endroits de passage et en surface : même les chats savent les enterrer, vous devriez y arriver
• Ne jamais laisser de nourriture pour les animaux sauvages
En repartant, je me suis dit que je ferais bien le tour du lac, mais près de 25 km… En tous cas, la nuit a été dépaysante et le Lac de Chaumeçon que l’on surnomme « le petit Canada » offre un paysage tout en rondeur.
On a beau être tout près des habitations (ce qui est aussi rassurant), le silence est total (en dehors des bruits naturels de la campagne qui sont aussi présents que le chant du coq dans les villages de campagne!) et franchement… on n’a pas besoin de la mer.
Alors certes, on n’a pas eu de totem d’immunité, ni de statuette, pas même 100 000 €. Mais on n’a pas eu à se taper Denis Brogniart ! Ça vaut bien de renoncer à quelques avantages.
Que d’eau, que d’eau !
Hydrospeed : un rush d’adrénaline pour clore ces micro-aventures nivernaises
Ouverte depuis mi-mai dernier, la société familiale Adrénaline rafting Morvan propose plusieurs activités en eaux vives : canoë-kayak, rafting et hydrospeed dans le cadre sauvage de la rivière Chalaux. Sensations et sécurité garanties !
In the Chalaux, Cha la laux
C’est un endroit qui ressemble au Canada, version Morvan : champs de digitales, sapins et route à lacets et au milieu coule une rivière : le Chalaux, dont le débit est garanti d’avril à octobre grâce au barrage de Chaumeçon tout proche.
C’est là que Nicolas « Nico » Gutierrez et son père Raphaël m’accueillent tout en sortant le matos que vont revêtir les aventuriers du jour : 10 pompiers qui viennent entre copains pour une séance d’hydrospeed aka une descente de la rivière accrochés à un flotteur… Perso, je suivrai ça depuis la rive !
Sécurité avant tout !
Tout débute par l’équipement : casque, palmes et combinaison rembourrée « une vraie armure » confirme Nico. 10 mn de route en van et la micro-aventure dans la Nièvre commence par le paysage, véritablement féerique. Entre les arbres, on voit le barrage de Chaumeçon : impressionnant !
Nous débarquons sur un ponton d’où ce petit monde va s’élancer. Les gars sont sportifs, mais n’échappent pas au briefing. Nico leur explique
comment se diriger avec une idée toute simple en théorie : « pour être manœuvrant, il faut aller plus vite que le courant ».
D’où les palmes. Ce qui n’empêchera pas quelques rencontres avec les rochers ou le fond. D’où le casque et la combi. Les gars sont chauds – la rivière un peu moins – mais bientôt tout le monde est à l’eau… c’est parti !
L’éclate en duo avec l’eau
Classé 2 passages 4 (sur un niveau mondial de 6), le Chalaux est une rivière technique qui fait « tout de suite entrer dans le vif du sujet » confirme Nico. Pour pratiquer, il faut « une certaine aisance, ne pas avoir peur de l’eau. C’est un peu physique. » Si on se sent moins à l’aise, il conseille plutôt le rafting qui se fait en groupe alors que l’hydrospeed est vraiment un corps-à-corps en solo avec la rivière.
C’est au passage dit « le S du Courtibas » que je retrouve les gaillards : debout sur un rocher, Nico les guide au-dessus de l’eau bouillonnante et l’un après l’autre ils s’élancent. Depuis la rive, j’ai l’impression de voir des bouchons ballotés par le rapide, mais apparemment eux se sont tellement éclatés que Nico leur permet un second passage…
Quand nous nous retrouvons, les pompiers sont en maillots – presque assez pour faire un calendrier – ravis mais un peu claqués. « C’est un peu ce que nous disent tous nos clients, confirme Nico en riant. Ils trouvent l’expérience super, cette sensation de liberté dans un cadre sauvage et veulent
recommencer… mais pas le jour même ! »
Le Chalaux étant un peu technique, on choisit l’hydrospeed si l’on est un peu sportif, à l’aise et volontaire. Sinon, l’option rafting est ok pour les groupes (EVJF, EVG, entre ami.e.s…) même pour les débutants. Au final, les sourires sont les mêmes !
Dans micro-aventure, il y a aventure, donc clairement : de l’imprévu. On a essayé de vous donner des pistes. On aurait pu en inventer beaucoup : prendre le train au hasard, revenir en vélo, partir en stop et se faire déposer n’importe où… essayer de déchiffrer le code civil.
Difficile de faire le tour car n’oubliez jamais que la plus grande micro-aventure dans la Nièvre est celle que vous vous inventez. Et si vous avez envie de faire partager votre imaginaire, n’hésitez pas et envoyez-nous vos idées !
Les bonnes adresses !
– L’escalade au Rocher du Chien à Dun les Places : 03 86 59 42 71
– Une balade en quad dans le Morvan (dès 6 ans) à Brassy : 06 83 49 51 17 www.cap-extreme.com
– Le Tour équestre du Morvan : 600 km de sentiers équestres balisés et équipés (sellerie, point d’eau, gîtes…)
– Parc aventure : Les Z’accrochés à Sauvigny-les-Bois : www.leszaccroches.fr
– Fun Parc Aventure à Gimouille https://fun-parc-aventure.fr/
Par Emmanuelle de Jésus et Antoine Gavory