Depuis 2019, Nevers accueille l’un des premiers campus connectés de France, un lieu où les étudiants peuvent suivre leurs études à distance sans pour autant tirer un trait sur les rencontres et le soutien des professeurs.
Des tables, des feuilles A4 à carreaux grand format et des sacs Eastpak. Devant leur ordinateur, un groupe d’élèves apparaît très appliqué pendant qu’un professeur se penche sur le devoir d’un jeune homme quelque peu en difficulté. Bien malin celui qui devinera que ces étudiants en lettres modernes, diététique, orthoptie ou histoire suivent tous une formation à distance.
Situé dans les locaux de l’Inkub à Nevers, ce campus connecté fait partie des premiers en France (aujourd’hui 89 autres lieux comme celui-ci se sont créés). Depuis quatre rentrées scolaires, cet espace labellisé par le ministère de l’Enseignement supérieur permet à des bacheliers nivernais de poursuivre leurs études supérieures depuis la cité ducale sans l’inconvénient principal du distanciel : l’isolement. Ici, il ne s’agit pas de se connecter vaguement à un cours magistral « en visio » mais bien de s’impliquer dans ses études grâce à un système d’obligation de présence dans les locaux et d’un suivi assidu par des tuteurs, également profs à la ville.
Plus de 7 000 formations accessibles
Avec 46 inscrits cette année, ce campus connecté serait le plus gros de France et les demandes se feraient toujours plus nombreuses chaque année, selon Françoise Hervet, élue neversoise chargée de l’enseignement supérieur. « Il existe tout un tas de raisons de choisir les études à distance. Se loger à Dijon, Clermont-Ferrand ou ailleurs a un coût non négligeable, explique Anne-Cécile Fradin, la coordinatrice du campus connecté de Nevers. Par ailleurs, certains jeunes ne se sentent simplement pas prêts à quitter le foyer familial, d’autres peuvent souffrir de handicap, avoir fondé une famille, travailler ou suivre plusieurs projets en parallèle comme les sportifs de l’USON. » Plus de 7 000 formations à distance sont accessibles désormais, de quoi laisser l’embarras du choix.
« J’ai souffert de troubles anxieux en 2019. Cela m’a poussé à arrêter des études qui ne me correspondaient pas », témoigne Thomas, aujourd’hui en licence de lettres modernes. Une mauvaise passe difficile à imaginer lorsqu’on échange avec cet étudiant détendu et souriant. Très épanoui dans ses études, Thomas a créé le BDE (Bureau des étudiants) et organise de nombreux événements sportifs, solidaires ou festifs. « Cela peut paraître paradoxal, mais ces études à distance permettent de rompre notre solitude. Nous nous retrouvons en petits groupes, les tuteurs nous connaissent. Rencontrer d’autres jeunes qui suivent des formations complètement différentes permet aussi de sortir de l’entre-soi. C’est hyper enrichissant », se réjouit le jeune homme.
“J’ai conscience de la chance de pouvoir suivre les études dont je rêvais, qui n’existent pourtant pas à Nevers”
Emma, en première année d’orthoptie, apprécie également la vie étudiante. « Nous nous réunissons souvent après les cours pour boire un verre ou aller voir un match, on se vide la tête ensemble. J’ai conscience de la chance de pouvoir suivre les études dont je rêvais, qui n’existent pourtant pas à Nevers. Et cela ne m’empêche pas de garder un lien avec les étudiants de la fac de Paris, dont je dépends. »
De son côté, Héloïse, malgré son jeune âge, semble avoir vécu mille vies. Déjà salariée lorsqu’elle souhaite reprendre ses études, elle ne peut pas se permettre de quitter Nevers. Grâce aux conseils du BIJ (Bureau information jeunesse), la jeune femme s’oriente alors vers une licence d’aménagement du territoire en alternance. Rebondissement en deuxième année de licence : Héloïse attend son premier enfant. Pas question pour autant d’arrêter ses études. « Les profs m’ont accompagnée avec bienveillance dans toute la spécificité de ma situation. Mon temps sur place est aménagé en fonction de mon travail et des horaires de la crèche. Au-delà des études, pouvoir sortir de chez moi et avoir un projet personnel m’a aussi aidée à mieux appréhender la maternité », confie Héloïse.
Des relations plus étroites avec les profs
Fini les amphis bondés et l’anonymat des grandes facs : les professeurs connaissent les parcours des élèves du campus, peuvent les aider dans certaines matières, leur prodiguent des conseils de méthodologie et les coachent plus généralement dans leur quotidien. « Il n’existe pas véritablement de rapport hiérarchisé. Mes relations avec les profs restent profondément humaines. Certains tuteurs se sont révélés de forts appuis émotionnels. Je leur en serai toujours reconnaissant », conclut Thomas. Au ton de sa voix, on aurait presque envie de retourner sur les bancs de l’école.
Infos pratiques : Campus connecté à l’Inkub, rue du 13e-de-Ligne, Nevers. Mail : campus-connecte@agglo-nevers.fr. Tél. : 07 63 44 76 79. Plus d’infos sur nevers-sup.fr
Virginie Jannière