Si on dit du Morvan qu’il est un petit Canada, on ne pense pas à associer Varennes-Vauzelles au Québec. Pourtant, la ville abrite un concept unique en France : la reconstitution d’une cabane de trappeurs où l’on s’adonne au lancer de hache en dégustant une poutine. Découvrez La Tanière des Enragés.
Nous sommes fin décembre 2022. Le blizzard paralyse l’Amérique du Nord avec des températures polaires. À 5 600 km de Montréal, et à 7 km du centre de Nevers, l’ambiance est nettement moins glaciale. Pourtant le Québec est là, tout proche, au cœur de la zone industrielle de Varennes-Vauzelles. Difficile à croire lorsqu’au volant de notre char (voiture en québécois) nous faisons notre entrée sur le parking de l’ancien restaurant routier l’Escale 7. Premier indice et signe que nous sommes bien arrivés à destination : un grizzli de deux mètres de haut se dresse devant nous. Certes il est en bois (et tant mieux d’ailleurs), mais il donne le ton, et sert de gardien à la Tanière des enragés.
Une fois les portes franchies, l’immersion dans la Belle Province (ainsi que le Québec se fait aussi appeler) est instantanée. L’ambiance est celle d’une cabane de trappeurs : grandes tables en bois, rondins en guise de sièges, canoë transformé en lustre et accueil chaleureux (à croire que, à l’heure où les prix de l’énergie s’envolent, la Tanière a voulu faire de la chaleur humaine une source d’énergie inépuisable). « Ça nous semblait incongru de créer un lieu où l’on ne s’évade pas. Nous souhaitions proposer un autre univers, explique Christelle Bousquet, qui a cofondé la Tanière avec son compagnon, Yoann Taillard. Auparavant, nous avions un restaurant de spécialités savoyardes à Beffes (Cher). C’est en voyageant au Québec que nous en sommes tombés amoureux. Nous avons voulu recréer l’atmosphère des cabanes à sucre, des lieux où l’on se retrouve autour de grandes tablées où tout le monde se parle. »
La Tanière des Enragés : un concept unique en France
Autre découverte locale : le lancer de haches. « Quand nous avons commencé à réfléchir au projet, l’activité était encore peu présente en France alors qu’elle est très répandue au Québec, se souvient Christelle. Nous sommes allés à Grâces en Bretagne nous former au siège de la Fédération française avant d’ouvrir la Tanière en février 2020. » Aujourd’hui, s’il existe une centaine de lieux en France où on peut s’y adonner, aucun ne ressemble à la Tanière des enragés. Loin de se contenter d’être un stand de tir, elle se vit comme un endroit où l’on vient prendre du bon temps. « On propose des poutines, la spécialité du Québec à base de frites, de fromage et de sauce brune, indique Christelle. Pour les frites, on travaille avec un producteur de pommes de terre local, la Ferme des Rauches à Beffes. Le fromage est fabriqué en Savoie à partir d’une recette québécoise. Seule la sauce brune est importée ainsi qu’une sélection de bières du Québec. Nous avons aussi des bières savoyardes et nous sommes en train de goûter des bières bourguignonnes pour compléter la carte. »
Avant d’empoigner nos fourchettes, on décide de se tester à la hache. C’est Yoann qui nous énonce les consignes et nous livre le secret pour réussir à planter l’étrange projectile : tout est question de distance et de technique de lancer. « On prend la hache en bout de manche, on bloque le poignet, on fléchit le coude, on lève l’épaule et on lance sans débloquer le poignet. » Contrairement à ce que l’on pourrait penser, le lancer de hache est tout sauf un sport de brute. « C’est plutôt un sport de précision », souffle Yoann. En effet, on se rend vite compte qu’il va falloir faire preuve de délicatesse pour que la hache trouve le chemin de la cible. Une cible que l’on peut faire évoluer en fonction de sa dextérité. « Pour ne pas polluer, nous n’utilisons plus de peinture mais un logiciel de projection de cibles. Nous sommes les seuls en France à faire ça. Vous avez le choix entre la cible standard, celle où l’on perd un anneau à chaque lancer, une autre où le centre se déplace, et même un morpion. »
Un lieu où le temps passe plus vite
Passé les premiers lancers hasardeux, on prend vite goût à la chose. À tel point que les 60 minutes que dure la session défilent sans que l’on s’en rende compte. D’ailleurs, c’est à croire que le temps passe plus vite dans cette tanière (qui, soit dit en passant, reverse chaque mois à une nouvelle association 10 % du chiffre d’affaires du lancer de hache). Arrivés à 18 h, nous en repartirons quatre heures plus tard après avoir calé notre estomac d’une copieuse poutine. Nous ne sommes pas les seuls à apprécier le dépaysement. « Notre proximité avec l’autoroute fait que les gens viennent de partout, de la Nièvre mais pas seulement », confie Yoann, un Neversois qui aimerait développer le concept de la Tanière ailleurs en France. C’est ce qui s’appelle mettre dans le mille…
Le lancer de haches en vidéo ici
Infos pratiques : La Tanière des enragés, Zone industrielle, 2, rue Denis Papin, 58640 Varennes-Vauzelles. Ouvert du mardi au samedi à partir de 18 h. Tarifs : à partir de 7 € par personne pour une session de 30 minutes de lancer de hache (à partir de 14 ans, possibilité de réserver en ligne), poutines à partir de 9,50 €. Tél. : 07 62 70 59 63. Plus d’infos sur la-taniere-des-enrages.fr
Gaspard Guérin