Le jour où j’ai dormi chez une sainte à l’Espace Bernadette

Vue aérienne de l'Espace Sainte Bernadette Nevers - © Régis Didier Déclic Drone

C’est à la fois l’endroit le plus visité de Nevers et le moins familier des Neversois. Adepte des voyages du bout de la rue, le journaliste de Koikispass Renaud Charles est allé passer une nuit dans le couvent de l’Espace Bernadette, qui abrite 86 chambres.

L’Espace Bernadette, vous connaissez ? Si vous trouvez la question saugrenue, faites un rapide calcul : combien de fois avez-vous longé les murs du couvent Saint Gildard ? Personnellement, j’arrive à plus de 3 000, à raison de trois fois par semaine en moyenne pendant 20 ans. Autre calcul, plus simple encore : à combien de reprises avez-vous franchi le seuil du 34 rue Saint Gildard ? Il est probable qu’une seule main vous suffise, voire qu’aucun de vos doigts ne se lève. Un paradoxe au vu des milliers de visiteurs du monde entier qu’a attirés Bernadette depuis plus d’un siècle qu’elle sommeille au cœur de Nevers. 

Mais vous, qu’est-ce qui vous a retenu de passer les portes de chez elle ? Vous n’êtes pas croyant ? Tout comme moi. Vous n’osez pas ? Peur de déranger ? De la réveiller ? Je vous taquine… Peut-être tout simplement ne vous êtes-vous jamais demandé pourquoi une telle “rock star“ vous avait toujours laissé aussi indifférent. Aussi sainte soit-elle, elle fait partie du paysage. Elle est la voisine discrète que vous ignorez sans même vous en rendre compte. Pourtant quelle histoire que la sienne ! Entre le 11 février et le 16 juillet 1858 (tiens donc ! 58…), âgée de 14 ans, Bernadette assiste à 18 apparitions de la vierge Marie dans la grotte de Massabielle à Lourdes. En l’espace de quelques mois, elle devient une célébrité internationale, provoquant l’affluence de pèlerins, de curieux et de journalistes. 

Une bulle de calme

Fuyant cette effervescence, elle se réfugie en 1864 chez les sœurs de la Charité à Nevers où elle finira par trouver le repos éternel quinze ans plus tard et où elle demeure, telle la belle au bois dormant. Avouez ! Ce n’est pas n’importe quelle voisine ! Une voisine particulièrement hospitalière qui possède 86 chambres. L’endroit parfait pour s’offrir un moment de calme sans partir à l’autre bout du monde dans un temple tibétain ou un ashram du Tamil Nadu. 

Alors pourquoi pas ? Pourquoi pas passer une nuit là où jusqu’à présent je ne m’étais jamais arrêté si ce n’est aux feux rouges du boulevard Victor Hugo ou de la rue de Lourdes. Un soir d’octobre dernier, me voici donc face au portail de la rue Saint Gildard. Dans ma poche, je détiens le code qui va me permettre de pénétrer dans ce sanctuaire. J’ai le sentiment d’être un privilégié. Ces murs, longtemps restés pour moi infranchissables, j’en détiens la clef. 

J’entre. Les vitraux de la chapelle où repose mon hôte sont illuminés. Dans les jardins, que j’ai maintes fois aperçus depuis la rue du Treizième de ligne, je contemple les lumières de la ville. Drôle d’impression que de se sentir ailleurs alors que chaque élément du paysage m’est familier. Je suis dans une bulle, un lieu baigné de mystère et de spiritualité, de magie aussi. Poudlard ?

Un destin aussi tragique qu’extraordinaire

Dans ma chambre, située dans l’une des ailes du couvent, il n’y a pas plus de télé que de bible rangée dans la table de nuit ou de crucifix au mur. Je suis dans un espace totalement neutre, laïque pourrait-on dire. Seule touche d’excentricité, l’un des murs est peint en bleu pétrole. Tout le reste est d’un blanc immaculé, y compris le lit. Allongé, je scrute le plafond qui doit se trouver à 4 mètres au-dessus de moi. Au-delà de cet au-dessus, j’ai la sensation de quelque chose, quelque chose de plus grand, quelque chose que je ne nomme pas Dieu mais quelque chose qu’il ne m’arrive jamais de ressentir lorsque je regarde le plafond de chez moi. Un quelque chose qui apaise, un quelque chose qui fait barrage aux petits tracas qui traversent l’esprit par salves, un quelque chose comme un reggae chanté par Bob Marley, à moins que ce ne soit un blues de Nina Simone ou Madame Butterfly interprété par Maria Callas. 

C’est sûr, le destin de Bernadette, aussi tragique (elle meurt à 35 ans après avoir dû endurer un asthme sévère, une tumeur à un genou et une tuberculose pulmonaire) qu’extraordinaire (elle sera canonisée en 1933), stimule mon imaginaire. Et dire que pendant toutes ces années, elle ne m’aura inspiré que des murs… 

Infos pratiques : Espace Bernadette, 34 rue Saint-Gildard, 58000 Nevers. Chambres à partir de 43€, petit-déjeuner inclus. Tél : 03 86 71 99 50. Infos et réservation sur sainte-bernadette-soubirous-nevers.com

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Renaud Charles

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