Royales, impériales ou nationales selon les époques, les Forges de Guérigny ont bénéficié d’un statut privilégié dans la production métallurgique de la France entre 1681 – année des débuts de l’activité – jusqu’en 1971 quand cesse la fabrication des chaînes d’ancres pour la marine militaire et commerciale.
Les heures de gloire
Trois siècles durant, les Forges de Guérigny connurent leurs heures de gloire. De 1741 à 1781, elles sont alors dirigées par Pierre Babaud de la Chaussade (1706-1792). Conseiller-secrétaire du roi Louis XV en 1743, fournisseur quasi-exclusif de la marine royale, il emploie jusqu’à un millier de personnes. En 1781, lors de la Guerre d’indépendance des Etats-Unis dans laquelle la France s’est engagée par l’intermédiaire de La Fayette, les forges de Guérigny relèveront le défi d’équiper en deux mois d’ancres, colliers de mâts, plaques de blindage, boulets de canon, 48 vaisseaux à quai dans le port de Brest. Placés sous l’autorité de l’Amiral Comte de Grasse, leur soutien aux troupes indépendantistes sera décisif. Georges Washington, premier Président des Etats-Unis se déclarera d’ailleurs “très obligé et très humble serviteur” du Comte de Grasse1.
1 – Extrait de : Correspondence of General Washington and Comte de Grasse (Edité par L’INSTITUT FRANÇAIS DE WASHINGTON) , lettre du 15 mai 1783.
Redonner le site aux habitants
Si depuis la fin du XVIIe siècle, la métallurgie s’est développée à Guérigny, c’est en raison de ses ressources et de sa situation privilégiée : cours d’eau (Nièvre, Nièvre d’Arzembouy et ruisseaux) qui apportent l’eau nécessaire à la forge, forêt pour l’approvisionnement en bois et la proximité de la Loire qui permet de transporter les pièces jusqu’à l’océan Atlantique mais aussi vers le Nord via les canaux de la Seine.
Alors propriétaire du château de Villemenant qu’il juge trop “Renaissance”, Pierre Babaud de la Chaussade fait construire en 1746 à côté des forges, le château de Guérigny (aujourd’hui de la Chaussade) : 4 400m² élevés sur un parc de 6 hectares qui, depuis 1990 avait été laissé au temps qui passe… Mais… Après avoir conquis l’Amérique, le site des Forges de la Chaussade veut reconquérir… Guérigny ! “Redonner le site aux habitants”, tel est le mot d’ordre du projet de développement porté par la municipalité.
Le théâtre des Forges Royales © Romain Liger
Le point d’eau alimenté par la Nièvre © Romain Liger
Le bâtiment au clocheton (classé) est l’élément central du projet. C’est là qu’étaient fabriquées depuis 1820 les chaînes remplaçant les cordages en chanvre, réalisés à Rochefort (Charente-Maritime). Le bâtiment qui accueille le théâtre (depuis 2014) et une salle d’exposition depuis 2017 (Espace Olympe de Gouges). Celle-ci sera aménagé en salle de spectacle de 500 places (Salle Lafayette). Le site compte aussi s’inclure dans un projet de mobilités douces en lien avec la forêt des Bertranges. C’est une façon de renouer avec le transport fluvial du temps de Babaud de la Chaussade et dans un projet d’hydroélectricité. Un moyen plus moderne de réutiliser les forces de l’eau. Une belle perspective pour ce lieu mémoriel chargé d’histoire !