D’une surface équivalente à la surface de la ville de Paris, la forêt de Tronçais, située à 70 km de Nevers dans l’Allier, possède une histoire riche et constitue un joyau à préserver. Koikispass s’est entretenu avec Julien Patzourenkoff, responsable de l’unité territoriale de Tronçais pour l’ONF, l’Office national des forêts.
Comment la forêt de Tronçais est-elle née ?
Julien Patzourenkoff : La forêt existe depuis toujours mais pas sous cette forme. En 1669, Colbert y a fait planter une multitude de chênes pour garantir la construction des bateaux militaires et commerciaux. Puis, dès le XVIIIe siècle, la forêt de Tronçais a alimenté les fourneaux pour l’industrie du fer. À partir de 1832, le forestier Joseph Louis Buffévent a introduit le concept de « futaie régulière ».
À quoi cette forêt ressemble-t-elle aujourd’hui ?
C’est une chênaie de 10 500 hectares, soit l’équivalent de la ville de Paris. Elle est composée à plus de 80 % de chênes, 10 % de hêtres et les 10 % restants sont constitués d’aulnes, de pins et de zones marécageuses. Considérée comme la plus belle chênaie d’Europe, elle est reconnue dans le monde entier pour la tonnellerie et la merranderie [la production de lattes de bois, Ndlr]. La biodiversité de Tronçais est également exceptionnelle. Certaines parcelles sont aujourd’hui des réserves biologiques intégrales, comme à Nantigny ou dans la futaie Colbert. Sur les cinq étangs de la forêt, trois sont désormais propriétés de l’État. Enfin, il existe plus de 300 km de sentiers balisés, beaucoup à but pédagogique, et des aménagements pour les personnes à mobilité réduite.
Qu’est-ce que le label « forêt d’exception® » dont jouit Tronçais ?
C’est un gage d’excellence ! Il consacre la qualité du massif forestier mais aussi les actions qui y sont menées. C’est un outil de concertation d’une richesse exceptionnelle, grâce à un comité de pilotage composé de 30 à 40 personnes, dont des élus et des associations. Ce label fédère les acteurs, permet un développement économique local et une mise en valeur de ce patrimoine naturel.
La forêt est-elle en danger du fait du réchauffement climatique ?
De 2018 à 2020, Tronçais a dû faire face à trois années de sécheresse intense. Après inventaire, nous avons constaté qu’un tiers des zones de la forêt avaient été impactées et avons déclenché la création d’une cellule de crise. Nous avons dû sécuriser les routes, suspendre des coupes et nous questionner sur le renouvellement des parcelles dégradées. Nous devons maintenant préparer la forêt de demain. En deux ans, les forestiers ont repiqué plus de 50 000 plants d’essences plus méridionales, des parcelles qu’on appelle « des îlots d’avenir ». L’objectif n’est pas de remplacer le chêne sessile, on sait que les arbres ont de grands pouvoirs d’adaptation, mais nous ne pouvons pas miser uniquement sur leur acclimatation.
N’est-il pas trop frustrant de ne pas pouvoir voir le résultat de son travail ?
Le temps des arbres n’est pas le nôtre. On sait qu’un chêne est mature autour de 200 ou 250 ans. Ces gros chênes que vous pouvez admirer ont été bichonnés par des générations de forestiers. Notre mission est de laisser ce patrimoine dans un état équivalent voire meilleur pour les générations futures, dans un principe de gestion durable. En réalité, le travail de forestier est passionnant. Et encore davantage à Tronçais !
Quand se promener en forêt de Tronçais ?
La chasse est interdite en forêt de Tronçais le dimanche. La chasse à tir a lieu les lundis et jeudis. Les chasseurs sont dans l’obligation de poser des panneaux pour délimiter leur chasse. Le jour de la chasse à courre est défi ni selon la saison.
Plus d’infos sur les panneaux des sites d’accueil du public
Plus d’infos sur onf.fr
Propos recueillis par Virginie Jannière
